Salariés itinérants : les déplacements domicile-travail peuvent être du temps de travail effectif
Lorsque les temps de déplacement domicile-clients accomplis par un salarié itinérant répondent à la définition légale du temps de travail effectif, ces temps doivent être rémunérés comme tel et non pas au titre de la contrepartie financière ou en repos prévue par l’article L 3121-4 du Code du travail.
Un salarié, technicien de maintenance, dont l’activité consiste à réaliser de petits dépannages dans la région de Normandie avec un véhicule de service, réclame le paiement d’heures supplémentaires pour les temps de trajets entre son domicile et ses premiers et derniers clients.
La cour d’appel rejette sa demande. Pour elle, ce temps de déplacement professionnel ne constitue pas un temps de travail effectif car le salarié bénéficie d’une certaine autonomie dans l’organisation de son travail, de sorte qu’il ne se trouve pas à la disposition permanente de l’employeur.
Le salarié se pourvoit en cassation, soutenant que ses temps de déplacement domicile-clients correspondent à du temps de travail effectif.
1-En droit français, le temps de travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer à ses occupations personnelles en application de l’article L 3121-1 du Code du travail. Ce texte s’oppose à l’article L 3121-4 du Code du travail, lequel prévoit que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas du temps de travail effectif ; que toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu de travail, il fait l’objet d’une contrepartie sous forme de repos ou financière.
2-De son côté, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), considère que lorsque les travailleurs n’ont pas de lieu de travail fixe ou habituel, le temps de déplacement de ces travailleurs entre leur domicile et les sites des premiers et derniers clients désignés par l’employeur constitue du temps de travail. Par ailleurs, elle indique que les notions de « temps de travail » et de « temps de repos » constituent des notions de droit de l’Union qu’il convient de définir selon des caractéristiques objectives, en se référant au système et à la finalité de la directive 2003/88/CE.
Afin de concilier le droit interne et le droit de l’Union, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que lorsque les temps de déplacement accomplis par un salarié itinérant entre son domicile et les sites des premiers et derniers clients répondent à la définition du temps de travail effectif, telle qu’elle est fixée par l’article L 3121-1 du Code du travail, ces temps ne relèvent pas du champ d’application de l’article L 3121-4 du même Code.
Dans la présente affaire, la chambre sociale applique à nouveau ce principe. Pour la Cour de cassation, pour relever de l’article L 3121-4 du Code du travail, le temps de déplacement domicile-clients du salarié itinérant ne doit pas répondre à la définition du temps de travail effectif fixée par l’article L 3121-1 du Code du travail. Tel n’est pas le cas lorsque le salarié est soumis à un planning prévisionnel pour les opérations de maintenance et que, pour effectuer ces opérations, il utilise un véhicule de service et est amené à transporter des pièces détachées commandées par les clients.
A noter : l’utilisation par le salarié itinérant d’un véhicule de service et le transport de matériels appartenant à l’employeur ou pour son compte pendant ses temps de trajet domicile-clients constituent des éléments permettant de qualifier ces déplacements de temps de travail effectif.